Focus sur les arrêts de travail et les moyens de combattre leurs impacts financiers. L’article L. 141-2-2 du Code de la sécurité sociale, un nouvel espoir ?

À travers la pratique contentieuse et les décisions des juridictions du fond, la voie de l’expertise judiciaire est apparue comme la voie naturelle pour tenter de réduire la durée excessive des arrêts de travail des salariés victimes d’accident du travail ou de maladies professionnelles.

En effet, en se fondant sur les dispositions 146 et 232 du Code de procédure civile, de nombreuses juridictions ont accordé le bénéfice d’expertises médicales judiciaires avant dire droit.

En pratique, ces expertises se révèlent bien souvent favorables et permettent de réduire la durée des arrêts en deçà du fameux seuil de 150 jours.

Toutefois, cette voie était soumise aux nombreux aléas judiciaires : tandis que certaines juridictions accueillaient favorablement les demandes d’expertises, de nombreuses autres juridictions se sont dressées contre cette pratique considérant qu’elle violait le secret médical et s’opposait à la logique de la présomption d’imputabilité.

Contre toute attente, le législateur, à travers la loi Santé n° 2016-41 du 26 janvier 2016, s’est immiscé dans le débat en introduisant l’article L. 141-2-2 du Code de la Sécurité Sociale qui dispose : « Lorsque sont contestées, en application de l’article L. 142-1 du présent Code, les conditions de reconnaissance du caractère professionnel d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou l’imputabilité des lésions ou des prestations servies à ce titre, le praticien-conseil du contrôle médical du régime de sécurité sociale concerné transmet, sans que puisse lui être opposé l’article 226-13 du Code pénal, à l’attention du médecin expert désigné par la juridiction compétente, les éléments médicaux ayant contribué à la décision de prise en charge ou de refus et à la justification des prestations servies à ce titre. »

Ces dispositions visent ainsi à « obliger » le médecin conseil de la CPAM à transmettre les éléments médicaux qui ont justifié la prise en charge d’un accident, d’une maladie ou d’une prolongation des arrêts de travail sans que celui-ci ne puisse – comme il le faisait en pratique – se prévaloir du secret médical pour échapper à cette communication.

Cette disposition légale a donc le mérite de venir légitimer les demandes d’expertises médicales judiciaires formulées par les employeurs, le secret médical n’étant plus un argument permettant de s’opposer à ces demandes.

Cela étant, on notera que le législateur est intervenu timidement puisque :

  • ces nouvelles dispositions sont loin d’être aussi précises que celles du contentieux technique
  • alors même que les enjeux sont les mêmes,
  • la transmission des pièces n’est prévue que dans le cas où une expertise médicale judiciaire est ordonnée, ce qui laisse entière la question de l’opportunité de décider ou non d’une expertise médicale judiciaire.

En matière de contentieux général et à la différence du contentieux technique, le juge reste donc seul à pouvoir décider d’ordonner une expertise… Les plaidoiries et l’art de le convaincre sont donc plus que jamais d’actualité !

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